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تنسيقية ابناء شهداء الصحراء المغربية
7 janvier 2010

Libérez nos soldats! Nos prisonniers militaires

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Libérez nos soldats!

Nos prisonniers militaires sont une honte pour l'Algérie, mais aussi pour le Maroc et certainement pour la communauté internationale, à travers ses organismes attitrés. Après six vagues de libérations, échelonnées, à intervalles très irréguliers, entre 1984 et 2002, il en reste 1362. Au jour d'aujourd'hui, la durée d'incarcération varie entre vingt ans pour les captifs les plus "récents" et vingt-sept ans pour les plus anciens.
Ce sont les plus vieux prisonniers des temps modernes, un anachronisme inhumain qui rappelle les oubliettes du Moyen-âge et leurs seigneurs de guerre. Où sont-ils rassemblés, quelles sont leurs conditions de détention, comment vivent-ils ou, plutôt, comment parviennent-ils à s'accrocher à la vie, au prix de quelle source d'énergie insondable, qu'eux-mêmes ne soupçonnaient peut-être pas?
Tindouf est leur lieu de captivité actuelle. Mais ils n'y ont pas toujours été, et rien ne prouve que tous y soient actuellement rassemblés.

Enfer

La quasi-totalité des 2064 prisonniers recensés par le CICR (Comité international de la Croix rouge), dont les 702 libérés, ont passé entre dix et treize ans dans des pénitenciers secrets, en territoire algérien. Ces prisons se trouvent à Boufarik, dans la banlieue d'Alger; à Boughar, près de Blida, à Ouidane dans Jbel El Khal sur la frontière entre l'Algérie, le Mali et la Mauritanie, plus une localité sans nom aux confins algéro-tunisiens.
À l’exception de Boufarik, ce sont des trous perdus, éparpillés aux quatre coins de l'immense désert algérien. On n'est pas dans les belles images envoûtantes du Paris-Dakar, mais dans un enfer carcéral au pays du vide, peuplé de chaleur torride et de froid glacial comme pour mieux séparer le jour et la nuit.
Quelques exemples pour parler concret.
L'adjudant Ahmed Azarar, capturé en 1979, a passé treize ans à Boughar, avant d'être ramené à Tindouf en 1994.
Cet ancien résistant de l'armée de libération, originaire de la région d'Ahermoumou, a été libéré en février 2000. Il avait 72 ans et des séquelles aussi profondes que son instinct de vie.
Le caporal-chef Omar Sefrioui et les 2ème classe Kassi Lahcen et Omar Tataoui, respectivement originaires de Khénifra et de Tata, ont été transférés à Ouidane, après une tentative ratée d'évasion en 1987.
Ils y sont toujours, selon des informations rapportées par des prisonniers libérés. Les matons de Tindouf, eux, voulaient faire croire à leur mort, en aménageant trois fausses tombes à leurs noms.

Secret

C'est dans ces pénitenciers secrets que la plupart des captifs de guerre décédés ont trouvé la mort. 601 cas identifiés, mais le compte n'y est pas. Il manque à l'appel 452 disparus qui ne figurent pas sur les listes du CICR, selon le colonel Baghdadi, un officier de réserve qui sait de quoi il parle, pour avoir servi au Sahara et écrit sur le sujet.

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• Le plus dur est le sentiment d’abandon.


Les organismes internationaux, le CICR et les deux hauts commissariats des Nations Unies aux réfugiés et aux Droits de l'Homme, n'ont pas accès à ces lieux de détentions secrets. Mais ont-ils au moins essayé? Apparemment, non.
Aucun des rapports de leur littérature diplomatico-humanitaire, sur près de trois décennies, ne mentionne les noms de ces prisons confidentielles qui, officiellement, n'existent pas, dès lors que l'État algérien nie leur existence.
Le moins que ces organisations puissent faire, c'est de témoigner auprès de la communauté internationale d'une vérité: le conflit du Sahara, avec toutes ses motivations géopolitiques et dans toutes ses dimensions humaines, n'oppose le Maroc et le Polisario, mais le Maroc et l'Algérie. Soutenir le contraire, c'est faire abstraction d'une réalité qui crève les yeux; c'est aussi sombrer dans le ridicule, au nom d'on ne sait quelle tartufferie pour les besoins d'une fausse neutralité.
À Tindouf, les conditions de détention ne sont pas meilleures que dans les geôles secrètes. Selon une vieille pratique coloniale, ce sont les prisonniers qui construisent leur prison. Mais avant l'achèvement des huttes en terre battue, qui leur serviront de cellules, ils ont passé entre six mois et un an dans des tranchées, à même le sol, se blottissant les uns contre les autres pour se protéger du froid nocture propre au climat désertique.
Comment passent-ils leur journée, ces oubliés d'une guerre qui n'a jamais dit son nom? À faire des briques qui sont utilisées pour les socles des tentes où sont logés les sahraouis civils séquestrés dans les camps limitrophes. Chaque prisonnier doit confectionner cent briques par jour.

Sévices

Les gardiens du Polisario veillent au comptage. Cela fait, selon la capacité des captifs, entre douze et seize heures de travail forcé par jour. Un régime de forçats pour une ration invariable, en guise de repas, à base de riz ou de lentilles. Les maladies digestives et oculaires sont chroniques. L'eau étant rare, les infections pour manque d'hygiène sont fréquentes. Le seul recours médical est celui des apprentis infirmiers cubains qui se font la main plus qu'ils ne soignent, ou les très rares passages des médecins du CICR.
La moindre réclamation, la plus infime des récriminations est sévèrement punie. Les tortures sont monnaie courante. Les protestataires sont attachés à des poteaux ou jetés dans des tonneaux pendant plusieurs jours, lorsqu'ils ne subissent pas l'arrachage des ongles. Le sergent Ali Aourigh, capturé en 1980, a été jeté dans une fosse à demi-nu, d'où il était extrait au petit matin, obligé de se rouler dans la boue et de se mettre au soleil. Une fois solidifiée par la chaleur, la boue formait une camisole étouffante; lorsqu'elle craquelait, des lambeaux de chair étaient décollés. Le supplice a duré des semaines. Libéré en février 2000, Aourigh en est revenu à moitié paralysé pour le restant de ses jours.

Hommage

Le caporal Abdellatif Derraz, capturé en 1979, a été condamné à mort à trois reprises, pour désobéissance. Alerté, le CICR est intervenu, chaque fois, pour le sauver du poteau d'exécution, mais pas des pires sévices qu'il a endurés. Il a, entre autres, passé une année dans un baril qu'il ne quittait que pour fabriquer ses cent briques quotidiennes.
Le bureau du CICR à Tunis fait des prodiges pour assurer l'acheminement d'un courrier qui, après avoir transité par Alger où il est ouvert et lu, met des mois avant d'arriver à ses destinataires, à Tindouf.
Quant aux colis, l'essentiel de leur contenu est confisqué, c'est à dire volé, par les gardes-chiourmes du Polisario.
Les familles rattrapent ce piratage en mettant le double ou le triple de la contenance.
Au-delà du traitement qui leur est infligé, transgressant les principes les plus élémentaires des droits humains, ces captifs militaires sont retenus envers et contre toutes les conventions internationales, particulièrement la convention de Genève de 1949 sur les prisonniers de guerre. Ils devaient être libérés au lendemain de l'accord de cessez-le feu, conclu sous l'égide de l'ONU en septembre 1991.
L'association des fils de martyrs et prisonniers du Sahara multiplient les recours et les intermédiations auprès des différentes institutions directement ou indirectement concernées.
Des lettres d'explication et de protestation ont été adressées au secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, et aux membres permanents du Conseil de Sécurité. La même association, qui fonctionne avec des moyens extrêmement réduits, -alors qu’elle devrait être reconnue d’utilité publique- a également engagé des procédures de justice en Espagne et en Belgique contre l'État algérien.
Ceci suffit-il? Assurément non. Bien que le Maroc ait tout récemment fait appel à la Suisse pour la libération de nos prisonniers de guerre, l'impression qui prédomine est que les pouvoirs publics n'en font pas assez sur ce dossier. C'est d'autant plus étonnant qu'ils s'agit des principales victimes d'une affaire nationale qui fait l'unanimité du peuple marocain.
Lorsqu'on parle, sporadiquement, de bruits de bottes et de risque de guerre, cela devrait être aussi pour libérer ceux qui ont sacrifié leur liberté. C’est avec ceux-là d’abord, que la patrie doit être “clémente, miséricordieuse” (ce sont des euphémismes) et surtout reconnaissante. Concrètement.


Plus dur a été le retour

Quelle est la situation des familles des martyrs et anciens prisonniers de guerre? Elle est, pour tout vous dire et preuves à l'appui fournies par l'association qui les regroupe, globalement lamentable et, dans certains cas précis, carrément désastreuse. Soyons clair; il ne s'agit pas de faire pleurer dans les chaumières, ni de faire une rétention de mauvais aloi sur une question aussi sensible où rien ne justifie une quelconque discrétion. Ce n'est pas une affaire militaro-militaire, mais une affaire nationale qui mérite, de ce fait, que le public en soit informé et même mobilisé.
Les longues années de séparation, vingt ans en moyenne, ont plongé les familles dans des problèmes matériels inextricables, en plus des souffrances psychologiques dûes au sentiment d'abandon. Mais plus dur encore a été le retour.

Retraites

Une rubrique résume cette situation: les salaires. La majorité des soldats tombés en captivité avaient atteint l'âge de la retraite lorsqu'ils sont revenus de plus de deux décennies de détention. Ils se sont retrouvés avec des pensions d'autant plus maigres qu'ils n'ont bénéficié d'aucune promotion de grade et des améliorations de salaires qui pouvaient aller avec. Entre un 2ème classe et un caporal-chef, la rémunération mensuelle est de 1200 Dh à 2000 Dh. On dira toujours que c'est la même grille salariale pour tous.
Pourquoi alors ne pas instituer, à titre à la fois exceptionnel et combien mérité, un complément ou une sorte de réparation pour sacrifice rendu à la nation? Un exemple parmi tant d'autres, l'épouse du caporal Mohamed Bouchane, dont elle n'a pas reçu de nouvelles depuis sa capture en 1976, vit, ainsi que ses six enfants, avec 1200 Dh par mois, moins que le Smig, comme salaire jamais actualisé de son mari disparu dans l'exercice de son métier de soldat.
La régularisation vis à vis de la mutuelle; les critères d'octroi de logements, déjà en nombre insuffisant; le chômage des enfants ayant fait des études universitaires; la prime de décès dont elles sont exclues, la liste est longue des difficultés aux quelles sont confrontées ces familles. Et pourtant, leur trouver des solutions adéquates ne grèverait pas le budget de la défense nationale. Alors quoi?
A.M.

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